Derrière cet acronyme, il y a un programme international de recherche rassemblant 35 pays (Europe, Chine, Inde Corée, Japon, Russie, États-Unis). Son objectif est de démontrer que la fusion de l’hydrogène, la source d’énergie du soleil et des étoiles, peut être reproduite sur terre et exploitée pour générer de l’électricité. Pietro Barabaschi a été nommé à la tête de l’organisation Iter en septembre 2022, quelques mois après le décès de Bernard Bigot.
Iter est l’aboutissement de plus de 60 années de recherche dans la plupart des pays industrialisés, et c’est à Saint-Paul-lez-Durance/Cadarache, aux portes de la ville, que l’immense ambition prend forme. Aix y croit beaucoup.
Rencontre avec Alain Bécoulet, responsable de l’ingénierie d’Iter (interview issue du Aix, le Mag n°51).
Pouvez-vous nous rappeler le procédé de la fusion ?
Au cœur du Soleil et des étoiles, les conditions de température et de pression sont telles que les noyaux d’hydrogène fusionnent, se recomposent et libèrent de formidables quantités d’énergie. Dans le Tokamak Iter, qu’actuellement nous assemblons, on vise à reproduire cette réaction, en empruntant un chemin sensiblement différent mais conduisant au même résultat : la fusion des noyaux d’hydrogène et la libération d’énergie qui en résulte.
À quel stade en est le projet ?
Depuis le mois de mai 2020, la séquence d’assemblage de la machine est engagée. Les pièces sont progressivement installées dans le « puits d’assemblage », un espace cylindrique de 30 mètres de diamètre et 30 mètres de profondeur. Cette étape doit durer encore plusieurs années. Elle sera suivie par l’étape de validation intégrée de cet assemblage, parfois appelée « premier plasma », puis par des phases d’assemblage complémentaires des composants. L’objectif est d’atteindre la phase de démonstration de la maîtrise des réactions de fusion au milieu des années 2030.
La pandémie a-t-elle affecté le calendrier ?
Oui car elle a fortement impacté les usines dans lesquelles les membres d’Iter fabriquent les éléments de la machine et les systèmes de l’installation industrielle. Il est important de comprendre que l’industrie n’a jamais encore été confrontée à de tels défis. Il s’agit de concilier la fabrication de pièces à l’échelle de celles d’un chantier naval, autour de 20 mètres de haut et plusieurs centaines de tonnes, et une précision digne de l’horlogerie. La révision du calendrier est en cours, ses conclusions seront soumises au Conseil Iter, l’organe exécutif du programme, qui seul, peut les valider.
À l’heure où l’Europe vit une crise énergétique, que pouvons attendre d’Iter dans l’avenir ?
Iter s’inscrit dans une perspective de long terme. Le Tokamak est une machine expérimentale dont la fonction est de procéder à une démonstration de faisabilité. Le retour d’expérience permettra de définir les paramètres principaux de la « machine d’après », collectivement baptisée « Demo ». Au-delà, la décision de développer une filière de fusion industrielle et commerciale sera une décision politique, laissée au libre choix de chaque pays, comme la France l’a fait au début des années 1970 quand elle a décidé de développer la filière nucléaire qui assure, hors période de maintenance des réacteurs comme aujourd’hui, 70% de notre production d’électricité.
La fusion de l’hydrogène ne prétend pas se substituer à toutes les formes d’énergie. Elle est appelée à occuper une place significative dans le mix énergétique à l’horizon du dernier quart de ce siècle, en complément des énergies renouvelables et du nucléaire conventionnel, c’est-à-dire les réacteurs de type EPR.
POUR LE TERRITOIRE, DES RETOMBÉES CONSIDÉRABLES
L’implantation d’Iter sur notre territoire doit beaucoup à Maryse Joissains, alors maire de la Ville, député et président de l’agglomération aixoise. Les retombées sont depuis considérables.
Le chantier de construction, qui a été lancé à l’été 2010 au terme de trois ans de travaux d’aménagement, est l’un des plus grands d’Europe. Il mobilise aujourd’hui plus de 2 500 personnes appartenant à quelque 500 entreprises européennes, dont 80% sont françaises.
On estime que, depuis le début des travaux, plus de 15 000 personnes ont contribué à la construction de l’installation. Depuis la PME locale jusqu’au consortium de grandes sociétés européennes, près de 5 000 entreprises sont intervenues sur le site.
Le montant total des contrats attribués depuis 2007 à des entreprises françaises est de l’ordre de 5,4 milliards d’euros. Sur cette somme, 4,2 milliards sont allés à des entreprises de la région Paca, dont 3,2 milliards à des entreprises des Bouches-du-Rhône. À ces sommes considérables s’ajoutent les dépenses des personnels évaluées à plus de 180 millions d’euros annuellement. La moitié, à peu près, des familles des personnels d’Iter résident sur le territoire du Pays d’Aix.
3,2 milliards d’euros
Depuis l’installation d’Iter, plus de trois milliards d’euros ont bénéficié à des entreprises
Article issu du "Aix le Mag" n°51, à consulter entièrement ici